dimanche 15 mars 2009

Vous avez dit service ?




PLUSIEURS PISTES de réflexion dans le billet de cette semaine.

VU À LA TELE, un reportage sur l’engouement pour la vente au poids de produits de consommation courante (farine, lait, shampooing, gel douche…). Ce qui est, en passant, un retour quelques dizaines d’années en arrière. Nos (arrière)grands-parents achetaient beaucoup de leurs produits quotidiens au kilo. On ne peut que se féliciter de ces initiatives qui permettent une économie d’emballage et une réduction des déchets, puisqu’on ne consomme que ce dont on a besoin. Mais finalement, on fait cela depuis toujours dans le métier de la traduction ! Le client ne paie que ce qu’il consomme, puisque la facturation est au mot (dans la grande majorité des cas). Et nous avons également la chance, depuis les années 90, de pouvoir livrer sous format électronique. Cela évite les émissions de gaz à effet de serre (les puristes me diront qu’il faut, malgré tout, déduire l’énergie consommée par les ordinateurs…c’est noté).


LE SECTEUR DES SERVICES, justement, dont nous autres, traducteurs et interprètes, faisons partie. Si nous ne sommes pas là pour apporter un service à nos clients, alors que c’est notre métier, qui va le faire ? Si vous vous souvenez de vos cours d’éco, le secteur primaire produit les matières, le secteur secondaire transforme et notre secteur tertiaire apporte un service en interagissant avec les 2 premiers. Et pourtant, je suis effaré de voir l’attitude désinvoltes de ceux qui nous servent dans les fast foods, ces derniers temps. Alors qu’a priori ils devraient tout faire pour garder leur job. Je pense à celle à qui Marie a demandé de parler plus lentement dans le micro du drive. On aurait gagné du temps à ne pas répéter. Eh bien, elle a répondu quelque chose comme « c’est votre avis, pas le mien ». Imaginez si je répondais à un client « si mon devis n’est pas clair, c’est que c’est vous qui ne comprenez rien ». Ou encore samedi soir, celle qui a oublié de me servir mon sandwich fait sur commande (au moins, il était chaud…). Elle n’a pas jugé utile d’esquisser le plus petit début d’excuse. Vous me voyez oublier de livrer une traduction (Dieu m’en préserve !) et ensuite balancer un courriel sans aucun mot d’accompagnement ? Si comme il a été dit dans d’autres billets la crise actuelle va assainir le marché, ma friterie de quartier sera la seule restauration rapide encore debout en 2010.


ENFIN, trouvé sur Twitter, cet article (en anglais) disant que la gentillesse va nous permettre de surmonter la récession. Ce n’est pas la première fois que les mots gentillesse, ou même amour, sont évoqués dans le domaine de la gestion d’entreprise. Cela peut se traduire par un geste sympa à la machine à café, ou ce que nos parents appelaient une Bonne Action qui aide un voisin au chômage. L’un de mes clients spécialisé dans les vêtements le disait déjà en début d’année : tout indique que 2009 sera l’année où l’on va se tourner vers l’autre. Je terminerai avec un clin d’œil à Pawel qui est caissier à ASDA à Brighton (GB). Bien qu’il fasse un boulot pénible, par un samedi ensoleillé, hier, il avait un mot gentil pour tous ses clients. Et un sourire inoxydable. Rien ne l’obligeait à en faire autant, mais cela lui faisait visiblement plaisir.


Faire son travail et être sympa avec les autres, ça marche et on a tout à y gagner.

J’attends vos commentaires.



Photos de signalstation

lundi 9 mars 2009

Get it ???




Je ne pouvais pas m'empêcher de partager avec vous ce courriel (pourriel en fait) que je viens de recevoir :

De : Apportent Differents
Ce message et une seule pension de fraude qui ont ete d'exploitation pour certains escrocs pretendant que c'est un message board pour les regarder

Je crois que c'est clair, non ?
Photo : inuyaki.com

samedi 7 mars 2009

Connaitre ses limites





JE PENSAIS parler cette semaine des limites de ses propres compétences et de l’intérêt de les connaître. Ce billet a germé dans mon esprit en consultant les prestataires de services d’un site d’annonces locales gratuites. Je me suis intéressé à un écrivain public professionnel, une activité proche de celle de traducteur. Je parcours la liste des services proposés, classiques, courriers administratifs et personnels, poème, etc. et cela se termine par « n’hésitez pas à me faire appel ».



Et là, je me suis dit que peut-être cette personne avait surestimé son niveau de français, et avait peut-être de bonnes intentions, mais n’avait pas le niveau pour vendre ses services. Ou alors est-ce un copier-coller malheureux, et dans ce cas, on attend d’un écrivain public qu’il se relise attentivement, non ?



J’en viens ainsi au besoin de connaître ses limites. Pendant que j’écris ce billet, justement, une des traductrices portugaises que j’avais interrogées préfère refuser une traduction parce qu’elle ne fait pas la variante brésilienne dont j’avais besoin. Je pense que dans notre métier il est primordial de savoir dire non quand on ne maitrise pas le sujet.



À partir de là, ce n’est pas nécessairement un non définitif. Il m’est arrivé il y a quelque temps de refuser un type de mission, alors que je l’accepterais aujourd’hui. Parce qu’entre temps, j’ai acquis la compétence ou j’ai su trouver le bon partenaire qui peut le faire pour moi.
Il appartient au traducteur freelance soit de sous-traiter s’il a la capacité et la volonté de le faire (là aussi en connaissant ses limites), soit de transmettre à un confrère/une consœur de confiance qui n’hésitera pas à faire la même chose lors d’une prochaine mission.



Les mauvaises traductions, ou malheureusement moins détectables, les traductions maladroites (du genre : The comprehension of your demands enables us to facilitate…) sont à mon avis souvent des signes d’un confrère (professionnel ou amateur) qui est allé au-delà de ces limites, sous la pression d’un client convaincant, ou d’une activité qui ralentit…



Puisque c’est la vocation de ce blog, je terminerai en évoquant l’intérêt de connaître ses limites pour la profession en général. Je prendrai l’exemple d’une expérience malheureuse d’il y a quelques années. Une collectivité locale organise un colloque et consulte les entreprises de traduction lilloise, dont la nôtre, pour 6 interprètes dans 3 langues, avec un planning un peu compliqué sur plusieurs jours. Marie trouve les interprètes disponibles et compétents, et fait une proposition qui n’est finalement pas retenue par le client.



Quelque temps plus tard, un interprète m’a raconté que lors de ce fameux colloque le client s’est arraché les cheveux face à la désorganisation de l’agence (?) qu’il avait choisie : interprètes prévus, mais absents aux repas, aucun coordinateur sur place, pas de numéro de portable, etc.






Alors client trop ambitieux ? Agence débordée ? Interprètes mal rémunérés et indisciplinés ? Toujours est-il que le client, peu habitué aux interprètes, risque à l’avenir de se débrouiller en interne avec des collègues ou des stagiaires. Et c’est toute la profession qui est discréditée.



Pensons-y.

Photo : US NOAA

mercredi 4 mars 2009

La négociation tarifaire




Petit post de mi-semaine (pour éviter d'alourdir le post hebdomadaire).




Suite à un précédent post de Céline, pour les jeunes diplômés non anglophones qui se posent des questions sur leurs tarifs, j’ai adapté en français (merci Marie pour tes suggestions) l’excellente check liste de Judy & Dagmar Jenner du blog Translation Times. La voici :



La négociation tarifaire - mode d’emploi



FIXEZ VOTRE PRIX. Comme dans tous les autres métiers, c'est le vendeur qui fixe le prix, pas l’acheteur. Si vous laissez l’acheteur dicter le prix, vous bafouez un principe de base du marché. Pour autant, la négociation n’est pas interdite… à condition d’être voulue par les deux parties.



PRENEZ CONSCIENCE que tout le monde ne va pas faire appel à vous au prix que vous fixez. Vous ne pourrez pas trouver un prix qui conviendra à tout le monde. Trouvez un prix qui vous convienne à vous et qui va correctement récompenser vos services.

NE VOUS JUSTIFIEZ PAS. Très souvent, les linguistes ressentent le besoin de justifier leur tarif. Vous devez tout simplement… donner votre tarif. Mon teinturier ne me donne pas de raison pour laquelle certains services sont facturés un certain prix, et ça ne m'intéresse pas.

SOYEZ FERME. Il n'y a aucune raison d'être « rentre-dedans » à moins d'y être obligé. Mais vous pouvez être à la fois polis et fermes. Il est également tout à fait acceptable de dire que vos tarifs sont non négociables.

FAITES UN GESTE. Si vous avez vraiment envie de travailler avec le client en question, et que vous ne pouvez pas vous entendre sur le prix, proposez une remise sur autre chose que le prix. Par exemple, nous avons parfois accepté de laisser tomber la majoration pour les PDF. Le client a bien perçu que c'était une valeur ajoutée et a accepté nos tarifs. Il faut parfois savoir faire un compromis.

LE POUVOIR DU SILENCE. Négocier est un art difficile, et la plupart d'entre nous parlent trop pour combler un silence embarrassant. Lancez-vous ce défi : après avoir donné votre prix, ne dites rien pendant quelques secondes et voyez ce qui se passe. C'est nettement plus facile au téléphone qu'en tête à tête.

NON EST UNE PHRASE COMPLÈTE. Enfin, pas vraiment, mais dire non est tout à fait acceptable et à tout moment. En tant que votre propre patron, vous avez le pouvoir et la responsabilité de décider avec qui vous souhaitez travailler. Si ça ne va pas, dites-le poliment. L'une de nos répliques préférées, que l'on doit à un linguiste ATA, est : "Malheureusement, nous n'avons aucune disponibilité à ce prix-là".

SACHEZ VOUS RETIRER. Après de nombreux échanges de courriels ou de coups de téléphone, vous devez décider combien de temps vous souhaitez investir dans cette relation commerciale potentielle. Si, par exemple, le projet de traduire l'acte de naissance d'un particulier vous coûte une heure de négociation, cela ne vaut sûrement pas le coup. Si le projet provient d'un prospect que vous pensez pouvoir transformer en client fidèle, il serait peut-être sage d'y passer plus de temps. Malgré tout, il faut avoir conscience que vous pourriez n'avoir aucun retour sur votre investissement (= votre temps) si vous n’arrivez pas à un accord, alors pensez-y et surveillez la montre.

METTEZ TOUT CELA PAR ÉCRIT. Envoyez votre devis par courriel ou par fax et demandez au client de le signer et de vous le retourner de la même manière.

FAITES CONFIANCE A VOTRE INSTINCT. Si vous avez le sentiment que votre correspondant tire trop sur la corde et que la situation ne vous convient pas, faites-vous confiance et déclinez. Vous ne voulez pas vous lancer dans une relation commerciale avec quelqu'un dont la personnalité, ou même les pratiques commerciales, ne vous correspondent pas.




Prochain post : connaitre ses limites



Photo : GirlReporter